roman graphique, etc.

mardi 1 novembre 2011

Bons points modernes

de Vincent Sardon
L'Association
30 planches


Ce livre s'adresse aux enseignants qui souhaiteraient revenir à la bonne vieille pratique de la récompense au mérite. Toujours avec bon goût. 


Onze ans après Mormol, Sardon signe un nouvel ouvrage à L'Association sous son identité pas secrète du "Tampographe" (le gars fabrique donc des tampons). Les Bons points modernes présentent au public une partie de son travail, sous forme de vignettes imprimées en deux couleurs. Ce n'est pas, à proprement parler, un livre, mais 30 planches (cartonnées) de huit bons points à découper et à distribuer aux bolos de la classe. Soit 240 vignettes.
© Sardon/L'Association 2011


L'humour très grinçant du Tampographe ne plaira pas à tout le monde mais, pour les moins sensibles, comme les fonctionnaires de l'Éducation Nationale, les bons points d'exception, à offrir ou à garder pour sa gueule, sont un incontournable. 
L'objet est une façon ludique, mais un peu légère (on en voudrait plus), pour aborder le travail de Sardon. Un échantillon, en quelque sorte, de sa production qui comprend beaucoup de détournements de textes et d'images (gravures anciennes, peintures), des tueurs en série et tout plein de vulgarités. Ce n'est évidemment pas exhaustif.




© Sardon/L'Association 2011

Sardon, comme il le dit lui-même, met la dernière main à un ouvrage plus complet qui regroupera ses travaux des quatre dernières années : textes, dessins, photos, pâtisseries, tampons. Ça s'annonce bordélique et passionnant. J'ai hâte. 






On n'en saura donc plus en janvier prochain, à l'occasion de la parution de ce deuxième opus, chez le même éditeur. Achetez Sardon.


Je m'excuse par avance pour cette mise en page dégueulasse, mais Blogger est définitivement une plateforme de merde.

jeudi 13 octobre 2011

En route pour le Goncourt

de Kierzkowski et Ephrem
Cornélius
80 pages


Pour accompagner la rentrée littéraire, une bédé raconte les affres de la création littéraire. Ou comment un auteur débutant compose avec la détermination et l'ego.


Difficile de se mettre à l'écriture d'un best-seller. Surtout lorsqu'il s'agit d'un premier roman. La persévérance et l'abnégation sont primordiales, autant qu'une confiance en soi en béton armé. 
C'est ce que vit le personnage d'En route pour le Goncourt tout au long des strips de trois cases du bouquin, fonctionnant sur le principe oubapien de l'itération iconique partielle, i.e. un certain nombre de cases (dont seuls quelques détails changent) sont utilisées en combinaison pour créer des séquences narratives*, du gag en l'occurrence. Ça évite aussi au dessinateur de trop avoir à se faire chier. 


© Kierzkowski-Ephrem/Cornélius 2011

Notre protagoniste se met donc en tête de devenir au moins l'égal d'Amélie Nothomb, sans jamais se décourager, même dans l'adversité de la page blanche ou face à la lettre de refus de l'éditeur. Po-si-tif. Et d'une bêtise candide qui confine au génie. Les auteurs et les éditeurs n'ont qu'à bien se tenir (même s'ils sont morts), ça égratigne.
Les gags sont intelligents et font mouche, alternant l'absurde, le potache, le graveleux, sans laisser de répit au lecteur. Le livre s'adresse aux amis de la littérature et à ceux qui cherchent un guide pratique du primo-romancier. Par ailleurs, si vous travaillez dans la chaîne du livre, ça marche encore mieux...


© Kierzkowski-Ephrem/Cornélius 2011

Kierzkowski et Ephrem en sont à leur premier essai, suite à une parution des strips sur leur blog (le Journal de la Création) il y a quelques années. Les reverrons-nous? Peut-être, peut-être pas. Chacun ayant d'autres choses à faire (obtenir un Goncourt ou la médaille Fields, par exemple).


Sortie en librairie le 27 octobre.
Je ne parle jamais d'argent, ça fait mauvais genre.


* L'itération iconique partielle est une des contraintes génératrices définies par Thierry Groensteen et ses copains de l'Oubapo (OUvroir de BAnde dessinée POtentielle). Pour les détails, voir Oubapo, vol.1 (et suivants), publié à L'Association en 1996. Pour des exemples concrets : Moins d'un quart de seconde pour vivre, de Trondheim et Menu (L'Asso, 1991), le Dormeur de (décidément, un jeune auteur plein de talent) Lewis Trondheim (Cornélius, 1993). 

mercredi 5 octobre 2011

Afghanistan

Collectif
Flblb
208 pages


C'est la rentrée! Beaucoup de sorties après un été plutôt calme et peu de temps pour lire (et le travail, et les problèmes et j'ai mal à ma jambe). Alors, beaucoup de lecture de résumés dans divers magazines gratuits et, à la vue de quelques titres de ce mois de septembre, une idée : créer une rubrique "la bouse du mois" parce qu'il est salutaire, autant que d'avoir un bon transit intestinal, de pouvoir dire du mal de temps en temps.




J'avais une affection particulière pour les éditions Flblb, surtout pour leur série Petite histoire des colonies françaises, vraiment marrante et bien foutue. Que n'ai-je vu sur une table de librairie les récits de guerre d'Afghanistan? Six jeunes auteurs ont été recrutés pour parler de la guerre, du quotidien des soldats, des civils, dans des histoires qui "mettent à distance le conflit par l'imaginaire, l'humour, le regard critique ou l'émotion et nous aident sinon à comprendre cette guerre, du moins à ne plus l'ignorer" (extrait du résumé de l'éditeur).
On est donc en face d'un livre d'éditeur, conjuguant sans fausse note une double mauvaise idée : 1) choisir la guerre parce que ça fait vendre et 2) constituer un casting de jeunes auteurs qui n'y connaissent rien et qui n'ont, pour certains, même pas fait leur service militaire, en garantissant la légitimité de leurs récits par le fait qu'ils soient "documentés". Déjà, sur le papier, je ne suis pas client.

Effectivement, l'intérieur ne m'a pas donné tort. Le sous-titre "récits de guerre" revêt tous les atours du chantage au réel : les histoires sont superficielles, recyclent les poncifs, manquent de fond et seraient transposables à n'importe quel conflit. Le sujet sent fort le prétexte à faire un livre, et son traitement poussif ne réussit pas à nous faire croire qu'il (le sujet) en est à l'origine. Aurait-on oublié le vieux principe du "on ne parle bien que de ce qu'on connaît", chez Flblb? Au moins une chose sur laquelle on ne ment pas au lecteur : la mise à distance. On est trrrès à distance. Qu'on ne se trompe pas, ce n'est pas la Guerre d'Alan, ni Opération mort, ni Gen d'Hiroshima, ni même du Joe Sacco. 




Notons que, l'objet n'étant pas le sujet, si je ne trouve pas le livre réussi, ça ne veut pas dire que je considère ses auteurs mauvais. Juste qu'ils se sont engagés dans un truc pas cohérent. Allez voir leurs travaux en direct pour vous faire une idée. Lisa Lugrin, Clément Xavier et Maxime Jeune animent le collectif Na qui édite la revue bimensuelle l'Épisode, Robin Cousin (la jeunesse de Billy-Bob Johnson) participe au collectif Les Machines, un micro-éditeur qui fait de très beaux livres à la main.


Voilà, c'était la bouse du mois de septembre. C'était Afghanistan ou P'tit Boule et Bill, parce que ça, c'est pire, mais on ne traite ici (pres)que de roman graphique. C'est dit.

vendredi 19 août 2011

Coucous Bouzon

d'Anouk Ricard
Gallimard (Bayou)
96 pages



Qui pense encore qu'Anouk Ricard est une illustratrice jeunesse? Qu'elle écrit des histoires toutes meugnonnes pour les ptites nenfants avant qu'ils aillent à dodo, avec des jolis bonshommes que c'est des animaux? Hm? Grave erreur! Elle nous prouve encore une fois en s'attaquant au monde de l'entreprise, façon The Office à la sauce Ricard... 






Ric(h)ard cherche du travail et se rend à un entretien d'embauche chez Bouzon, fabricant de coucous suisses. À moins qu'il n'ait mis les pieds dans un univers parallèle ou une maison de fou? Il y sera engagé après quelques formalités. "Vous pouvez toucher vos pieds jambes tendues? C'est quoi ce papier de merde? Vous pourrez apporter un ordinateur?". Pendant qu'il tente de faire sa place, Richard apprend que son prédécesseur a disparu, comme ça. Sans préavis. Aidé de Sophie, la secrétaire, il mène l'enquête... 


Véritable ode à l'absurde et au non-sens, Coucous Bouzon dépeint un univers clos dans lequel les bizarreries que l'on croise en entreprise ou (surtout?) dans l'administration sont poussées à l'extrême : chef fantasque, réunions inutiles, comportements sociopathes, règlement abscons, etc.


Après l'inénarrable Commissaire Toumi (éd. Sarbacane), dans lequel elle déforme les codes du genre policier, Anouk Ricard donne ici toute la mesure de son humour dans une ambiance corporate* surréaliste, mais qui touche à l'universel. Un hit, pour sûr.






En librairie le 1er septembre.


* Si si, la loi Toubon autorise l'emploi du mot corporate.
Planches reproduites avec l'aimable autorisation des éditions Gallimard jeunesse.